Nouveau site

Ancien site
Tout savoir sur le futur site Web








© Escalade Alsace
Yann Corby


Une année d'escalade [septembre 2009 - octobre 2010]

Texte, photos : Florent Wolff, Pierre Bollinger


#2 Canada : grimpons !

[Récit du 19 septembre 2009]

"Flo, tu ne crois pas que tu devrais envoyer une deuxième chronique à Yann ?"
- "Mais qu'est-ce qu'on a à dire ! Nous passons notre temps à lire, recroquevillés dans le van, sous l'épuisant claquement de la pluie sur la tôle..."


Nuit étoilée sous The Chief... - Pierre, lors de la lecture rituelle du soir

Après les soucis automobiles ("p... de caisse américaine ! La faillite, ils l'auraient bien méritée !!"), restait le problème climatique pour lequel la solution est connue : la patience.
Pour rendre l'attente moins pénible, le canyon de Cheakamus est plutôt bienvenu.
Une vingtaine de kilomètres au nord de Squamish, Cheak' (prononcez "tchique") accueille le premier 8b+ canadien, Pulse, ainsi qu'un des 8b les plus classiques du pays ("La Rose" canadienne), Division Bell. Ces deux lignes traversent l'impressionnante lame de granite du secteur Big Show où Sonnie Trotter ouvrit notamment un 8c+.
La pluie nous encercle toujours, l'atmosphère quasi tropicale, si ce n'est qu'il ne fait qu'une dizaine de degrès. Après nous être échauffé dans Bottom Feeder, un 7c classique, sec (si si) et technique, nous nous essayons à Division Bell. La ligne est superbe ; une traversée sur des fentes en pente, un crux en verrou et une oreille arquée, suivi d'une quinzaine de mouv très physiques. Un vrai test de rési ! Plusieurs prises sont humides, rendant l'enchaînement impossible. Et de toutes façons, nous ne nous sentons pas encore au niveau réclamé par l'enchaînement.
Rebelotte le lendemain si ce n'est que c'est encore plus humide. Une montée dans Pulse pour Pierre qui confirme ce que pensent certains à demi-mots : le premier 8b+ canadien aurait été côté 8c dans de nombreux endroits... Nous terminons, la journée dans Mr. Negative, un 7c bizarroïde qui comporte en effet de très nombreuses prises négatives. Peu commode, la voie nous réclame plusieurs essais.


le soleil se lève enfin sur Squamish ! - Pierre grimaçant, nous ne sommes plus habitués à l'astre solaire !

Le lendemain, le ciel enfin dégagé nous permet de nous rendre dans la forêt du Chief (au pied du big wall éponyme) pour s'essayer à l'une des rares voies du coin, Permanent Waves, que des locaux nous avaient conseillé. La ligne est superbe, une des plus belles que j'ai vue.


Florent dans le début du crux final de Permanent Waves (8b, Cacodemon Boulder)

Située sur le Cacodemon Boulder, immense bloc de granite sur lequel se trouve Dreamcatcher (le célèbre 9a de Sharma), Permanent débute par un arbre, puis une vire en pente peu rassurante, les hostilités commencent vraiment sur une rampe oblique de plats, très technique à grimper. La fin est très bloc : deux arquées à serrer, des pieds précaires, puis un gros dynamique vers une écaille... La voie est côtée 8a+, mais les grimpeurs que nous avons rencontré parlent plutôt d'un 8b. Nous sommes plus que d'accord avec cette estimation. Il nous faut deux séances rien que pour enchaîner la section bloc du haut. Reste à rajouter la première partie en 7c ; pas vraiment gagné, d'autant qu'il faut que ça colle...
À la troisième séance dans la voie, nous nous effondrons logiquement dans le crux du haut... Réconfort : nous parvenons à enchaîner Neurotica au premier essai, un beau 8a (davantage dans notre style, des arquées éloignées) situé sur un bloc au-dessus.

Après un break de deux jours à Vancouver où nous récupérons à la fois notre van (avec une transmission toute neuve, mais notre épargne mise à mal...) et Julie, l'amie de Pierre, qui passera deux semaines avec nous ici, nous retournons à Cheak, sous la désormais habituelle pluie. Pierre fait un très bon essai dans Division Bell, mais le crux final a raison de lui, et de toutes façons, la sortie était trempée... Je me contente d'une petite séance de force dans Pulse, avec comme objectif premier, de surcompenser pour être en forme le lendemain pour Permanent.
Le lendemain donc, le ciel est couvert mais ne pleure pas. Par contre, la pluie est à nouveau annoncée pour la fin de journée. Pierre s'échauffe avec Julie dans de très belles voies sur coinceurs.


Julie dans Burger and Fries (5.7, secteur Smoke Bluff) - Pierre dans un 6b de Murin Park

À 17 heures, habités par un stress aussi grand que la "fenêtre" météo est courte, nous sommes au pied de Permanent, la voie qui nous hante depuis une semaine. La rampe est sèche, et "colle" suffisamment. Pierre s'élance le premier, arrive à la première arquée du crux, où ses trois doigt semblent se placer mieux que d'habitude, et d'un cri rageur, passe le dynamique final. Il se rétablit sans encombres vers le relais. Soulagement. Plénitude. Deux sentiments que je suis encore loin de connaître au moment où je m'élance à mon tour dans la voie. Je suis fébrile dans la première partie, mais arrive tout de même relativement frais dans le crux, je broie la dernière arquée avec trois doigts, contre quatre habituellement, et m'élance de tout mon possible pour le saut final. Mes deux phalanges se maintiennent, je sens l'écaille trembler sous mon poids et la violence du mouvement. Ni moi ni la prise ne cédons. Je retrouve vite mes esprits pour les dernières poussées de pieds précaires qui permettent de se rétablir dans la dalle. C'en est fini de Permanent !
La raison de notre périple m'apparaît évidente ; c'est bien sûr pour vivre de tels moments que nous avons choisi de traverser l'océan, pour nous retrouver dan une forêt austère et humide ; les paradis sont souvent cachés.



A suivre....




Merci à nos partenaires :
       Les habits de Pierre et Florent      
   








www.escalade-alsace.com