Quelques
mots en cette morne journée de novembre qui suit de près le Jour du Souvenir
pour vous rappeler que les cotations en escalade ne sont que des repères
fictifs qui, au mieux, permettent à certaines personnes de se péter les
bretelles devant un groupuscule de sycophantes et, au pire, amènent d’autres
personnes à commettre des atrocités dignes des Jeux du Cirque sur le support de
choix de l’activité : le rocher.
Car
pour nous qui appelons un chat par son nom – ’’Christ de chat! Y m’a encore
mordu la jambe ! ’’ – les cotations ne sont que des repères qui nous évitent
d’avoir à redescendre d’une voie trop dure pour notre maigre niveau en laissant
une dégaine au dernier point atteint de peine et de misère. On ne peut, ni ne
veut, s’en vanter et d’ailleurs il y a tellement peu de groupies en escalade –
contrairement à d’autres sports - que
jeter un chiffre comme ça sur une table de bistrot… et bien ça va amener le
serveur à nous indiquer la direction de la chambre qui affiche ce numéro sur la
porte. Ce qu’il y a derrière cette porte pourrait être plus surprenant que le
bidoigt taillé de la fin de voie…
Les
cotations ne sont que des approximations d’une difficulté toute relative. La
grandeur , la force , le poids , le style de voie , le type de rocher , l’heure
du jour , la température ambiante, l’horoscope du grimpeur et de l’assureur de
même que l’odeur des chaussons du grimpeur de tête influent sur la perception
de cette difficulté . Mercure en Maudit et un ascendant laitue fait que la
cotation d’un bloc Bleau sera plus facile … mais Neptune en Streptocoque et un
ascendant tarte flambée alors que la Lune est à son zénith fait que
toute voie de Nice paraîtra beaucoup plus difficile que la réalité.
Même
un équipement aléatoire posé par des illuminés qui s’abîment dans le vin du
Languedoc peut amener une hyperstimulation du corps calleux et une
surestimation de la difficulté. Obligeant les grimpeurs à reprendre le chemin
du bistrot pour y élaborer une nouvelle stratégie . Même chose dans certains
travaux Faraonesques qui amenèrent bien
des individus à jouer les Icares pour ensuite sombrer dans un alcoolisme
latent.
Il y
a bien entendu le travers opposé : lancer une cotation bien en dessous de
sa difficulté moyenne puis s’asseoir et écouter le concert de hurlements venant
des grimpeurs attirés par la facilité comme des mouches par la lampe du balcon.
Un bien vilain tour et, si j’ai un conseil à donner aux équipeurs désirant
taquiner le pitre, je suggère fortement d’y aller pour une voie en dalle. La
dalle, c’est comme le miel pour les ours : plus la dalle est grosse et
plus les grimpeurs y seront massifs. La dalle est un piège à gros. J’en sais
quelque chose.
Et
qu’en est-il de ces sites web qui créent une gradation des grimpeurs selon la
difficulté et le nombre de voies réussies? N’est-ce pas courir après le vice?
Élever le mensonge au niveau du Grand Art ? Sans doute… j’ose penser que chacun
des grimpeurs affichant sur ces sites est le seul à croire à ses performances… Nous
sommes une espèce qui aime à créer des listes. N’existe-t-il pas une liste des
créatures surnaturelles qui sont les serviteurs du bon dieu : les Anges,
Archanges, Séraphins, Puissances et autres créations de l’esprit? Une liste des
péchés capitaux? Une liste électorale comportant des candidats honnêtes tout
autant que les anges sont réels? Nous existons pour créer des listes fictives!
Le
problème dans tout ça, ce n’est pas le corps calleux. Ce n’est pas les corps
caverneux non plus bien que ces derniers
nous aident grandement à grimper dans d’autres situations.
Non…
rien à faire avec le cerveau ou les couilles!
Le
problème dans tout ça, c’est qu’il n’existe pas une échelle de plaisir.
Pourrions-nous imaginer une échelle de cotation basée sur le plaisir ludique de
faire une voie? Je me souviens de certaines voies faciles dont j’aurais
souhaité qu’elles ne finissent jamais tellement j’éprouvais du plaisir à faire
les mouvements. Malheureusement, à cette époque, Gère Mène m’assurait souvent
et je n’avais pas le droit de refaire une voie car on devait ’’prendre une
pose’’ parce que je suis lourd et que me descendre était un travail de Titan.
Maintenant je ne fais qu’équiper ce qui est comme un plaisir solitaire coupable
dont on ne se vante pas en société.
Oui,
la solution est dans la création d’une échelle de facilité basée sur la
jubilation ressentie lorsque arrivé aux chaînes. C’est une vision hédoniste de
l’escalade, bien entendu!
Mais
n’est-ce pas ce pourquoi on grimpe?
Je
reviens de la vaccination contre la H1N1 . Ce serait un autre
sujet burlesque si ce n’était que j’y suis obligé pour des raisons familiales
mais aussi parce que la vaccination nous a prouvé que le gouvernement n’avait
pas de plan en cas de crise et qu’il était incapable de planifier une campagne
de vaccination efficace. Si c’est Ebola qui se présente, nous sommes tous morts
!
Une
raison de plus pour être hédoniste.
Carpe
Diem
JPB