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© Escalade Alsace
Yann Corby

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DERNIERES NOUVELLES D'ALSACE par Thomas Leleu     [écrite le 24 mai 2007]


COCO DESIREE

Dans les profondes forêts vosgiennes, esprits, elfes et autres farfadets rôdent depuis toujours à l'abri d'épaisses futaies, au fond de quelques grottes insondables ou au sommet d'inaccessibles champignons de grès rose.
Mais aujourd'hui, sous nos latitudes, la vie des lutins et des fées est devenue bien difficile. Menacés par de nouvelles hordes de randonneurs et de grimpeurs RTTistes se répandant dans nos forêts comme la vérole sur le bas clergé, ils ont du fuir bien loin, de l'autre coté de la frontière en des lieux oubliés de tous.
Mais, même là bas, dans la Pfalz, vous aurez bien peu de chance d'en apercevoir. Pourtant, ils sont là, au creux des rochers, dans les fissures d'une de ces voies sableuses et sous-équipées du cœur du Palatinat. Je le sais, car ils s'amusent, de temps en temps, à me jouer de petits tours ou à me faire de petites surprises… Certains font apparaître sous mes doigts hésitants une prise salvatrice lorsque je suis en difficulté dix mètres au dessus d'un improbable coinceur ; d'autres, plus perfides, font disparaître à mes pieds un galet crucial alors que je m'apprête à mousquetonner le ring sommital.
Parfois, les petits esprits de la Pfalz vont encore plus loin et s'amusent à vous faire vivre des aventures surréalistes...
Ce jour là, nous étions Mick et moi sur le chemin du retour après une courte et laborieuse journée d'escalade. Notre route sinueuse déroulait son long corps d'asphalte aux pieds des bucoliques collines pfazsiennes.
Soudain, au détour d'un virage, surgissant littéralement de la canopée palatine, apparu la fameuse Table du Diable. Nous connaissions, pour en avoir aperçues quelques photos, cette curiosité géologique, mais nous ne l'avions jamais approchée.
Instantanément sortis de notre torpeur, nous décidâmes de nous diriger sans plus attendre vers ce haut lieu du Palatinat.

La Teufelstisch de Hinterweidenthal, c'est un peu l'emblème de ce petit coin d'Allemagne de l'ouest. Dessins, gravures anciennes, photographies multiples, témoignent de la fascination ancestrale des populations locales pour cette " auguste architecture du hasard ". Autant dire que nous nous attendions à ferrailler au milieu d'une foule de touristes.


Jérémie Chenevotot au sommet de la Teufelstisch [Photo : Yann Corby]


Et pourtant, sur le parking : personne. Sur le large chemin d'accès : personne. Ah, si ! Sur les derniers mètres nous croisâmes une jeune femme…comment dire… Une des ces apparitions que l'on imagine ne pouvoir rencontrer que sur le podium d'un défilé de mode.

Et puis nous arrivâmes au sommet de la petite colline où sied la Teufelstich. Incroyable : A dix mètres du sol, un bloc monumental semblait se balancer sur la pointe d'une aiguille. Quel enchantement, parvenait encore à maintenir cet étrange équilibre ? Nous levâmes les yeux vers l'inaccessible sommet de ce bilboquet géant, en songeant aux frères Matheis qui dès 1923 osèrent franchir le surplomb de cet improbable édifice.

Absorbés dans nos pensées, nous remarquâmes à peine un petit groupe de personnes s'affairant au pied du rocher. La déesse de tout à l'heure n'était finalement pas seule : entourée de deux photographes, elle posait, court-vêtue, devant la "Table du Diable " dont je m'apprêtais à réaliser l'ascension.
C'est alors que l'un des photographe m'interpella : " vous allez grimpez ? Pouvons-nous vous prendre en photo ? ". Je ne m'étonnais pas de cette demande. Quel grimpeur ne s'est jamais retrouvé mitraillé par quelque curieux s'émerveillant benoîtement de ses évolutions verticales ? Pourtant, bien vite, je m'aperçu que je n'étais pas le principal centre d'attention : la belle s'étais dressée sur un bloc, devant le départ de la voie et face aux objectifs. Je n'étais finalement qu'un faire-valoir.
Alors que je m'engageai sur les premiers mètres de la " Teufelsdach ", un peu étranger aux agissements des paparazzi du dimanche, une exclamation de Michaël attira mon attention. Devant le spectacle qui s'offrit à moi, je manquais de lâcher prise : nous étions bel et bien en pleine séance de photo de cul. Dans des poses lascives, la starlette en tenue d'Eve offrait son corps aux flashes des photographes. Evidemment Michaël ne prêtait plus la moindre attention à son assurage.

En moins de temps qu'il n'en faut pour l'écrire, je terminais de gravir de la table du diable - qui finalement avait perdue un peu de son intérêt - et redescendis au sol.
Michaël fut alors mis à contribution par les photographes : " voulez-vous poser avec la demoiselle ? " ; " allez-y, n'ayez pas peur : prenez là dans vos bras " ; " plus près " ; " n'hésitez pas : mettez lui la main sur les fesses … ". Et Mick de se prendre au jeu, enlaçant la jeune femme, mimant un baiser, caressant les courbes généreuses de sa partenaire qui s'emblait s'amuser follement de nos airs stupides. Surréaliste !!! La situation, le lieu, la falaise : tout semblait se dérouler dans un monde parallèle, comme par enchantement...


Michaël, Thomas et Coco [Photo : Johannes Martin Kunder]


Puis la séance de photo pris fin. Le photographe, directeur d'une " agence de photos de charmes ", nous remercia, et nous prîmes le chemin du retour, encore envoûtés par la bien nommée Coco Désirée.
Alors que nous devisions sans fin sur notre petite aventure, Michaël se tourna vers moi, un sourire aux lèvres : " tu sais Thomas, il se passe des choses pas normales dans ces forêts pfalzsiennes ".

Thomas Leleu


[Sa chronique précédente : Vive les JO !]









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